Actualités 1317 Notaires

Les limites du recours au testament international

La Convention de Washington du 26 octobre 1973 encadre le testament international. Ce dernier va permettre à un testateur de rédiger ses dernières volontés dans une autre langue.

Cependant, la validité d’un tel testament est subordonnée à diverses formalités, et notamment celle concernant la compréhension de son contenu par le testateur, comme l’a rappelé la Cour de cassation dans son arrêt du 17 janvier 2025.

Dans cette affaire, un testament, reçu par un notaire en présence de deux témoins ainsi que par la présence d’un interprète, a été rédigé en français par une personne italienne. Ce dernier a institué les filles de la testatrice en tant que légataires de la quotité disponible. À son décès, elle laisse pour lui succéder ses filles ainsi que son petit-fils venu en représentation de sa mère prédécédée.

S’estimant lésé, le petit-fils assigne ses tantes en nullité du testament. Ces dernières ont alors impliqué le notaire à l’instance.

La procédure judiciaire sur ce testament est assez longue puisque cette affaire était déjà passée une fois devant la Cour de cassation. En première instance, les juges ont annulé le testament en estimant qu’il n’était ni valable en tant que testament authentique ni en tant que testament international. Toutefois, la première Cour d’appel l’a validé, ce qui a amené la première saisine de la Cour de cassation. Cette dernière a censuré les juges du fond, mais c’était sans compter sur la Cour d’appel de renvoi qui a encore validé le testament litigieux.

En effet, la Cour d’appel a estimé que la présence de l’interprète italienne, bien que non assermentée, suffisait à faire comprendre à la testatrice le contenu du testament. Les juges relèvent et affirment que le rôle de l’interprète sert justement à pallier cette absence de compréhension. Or, selon le petit-fils, le testament international ne peut être rédigé dans une langue que le testateur ne comprend pas, même avec l’assistance d’un interprète.

Cette fois, c’est l’assemblée plénière de la Cour de cassation qui s’est prononcée afin de savoir si un testament international doit obligatoirement être rédigé dans une langue comprise par le testateur, ou si l’assistance d’un interprète suffit.

Ainsi, la Cour de cassation casse et annule l’arrêt de la Cour d’appel au visa des articles 3 §3, et 4 §1 de la loi uniforme sur la forme d’un testament international annexée à la Convention de Washington du 26 octobre 1973 et l’article V.1 de cette dernière.

La Haute juridiction rappelle qu’il ressort plusieurs interprétations possibles de ces textes :

  • Le testament international ne peut être rédigé, malgré la présence d’un interprète, dans une langue que le testateur ne comprend pas. Il s’agit de la position adoptée par le premier arrêt de la Cour de cassation (Cass, civ 1ère. 2 mars 2022, n° 20-21.068) ;
  • Le testament international peut être rédigé dans une langue que le testateur ne comprend pas, à condition que la loi dont dépend le notaire en charge du testament autorise le recours à un interprète.

C’est cette deuxième interprétation qu’a adoptée l’assemblée plénière en janvier dernier.

Par ailleurs, il convient de rappeler que la loi du 16 février 2015 a assoupli le formalisme du testament authentique (article 972 du Code civil) afin de permettre l’assistance à un interprète dans la rédaction d’un testament dans une autre langue que le français. Cette possibilité n’est offerte qu’à condition que cet interprète figure parmi la liste nationale des experts judiciaires.

Toutefois, cette loi ne concerne que les testaments rédigés après le 18 février 2015. Or, en l’espèce, le testament était rédigé avant cette, d’autant plus que l’interprète n’était pas assermenté. Dès lors, il n’est pas possible de reconnaître ce testament comme un testament authentique ou un testament international.

Référence de l’arrêt : Cass, AP du 17 janvier 2025, n°23-18.823